Extrait de l’article État des lieux de la direction artistique en France,
Véronique Vienne, Graphisme en France 2015.
« Au départ, Magazine était un gratuit, chaque numéro étant la responsabilité d’un créatif différent. Parmi eux, des directeurs artistiques de tous genres (Michel Mallard, Christoph Brunnquell, Sophie Toporkoff, Thomas Lenthal, Peter Knapp), des studios (H5, Surface to Air), mais aussi de nombreux graphistes (Loran Stosskopf, De Valence, Laurent Fetis, Antoine+Manuel, Sylvia Tournerie, Change is good, Étienne Mineur). ‹ Notre budget était exactement zéro, convient Cirimele. Pour les créatifs qui faisaient don de leur temps, c’était évidemment une vitrine. Mais quoi ? On travaille trois semaines gratuitement pour faire une chose qu’on ne fera qu’une fois dans sa vie ? › Magazine, pour Cirimele, est dépositaire d’un savoir-faire qui se perd : celui de créer un contenu éditorial qui ne répond pas a priori à une commande.
Magazine est maintenant une publication payante, à dos carré, un objet de collection. Depuis quatre ans (dix numéros), le même directeur artistique, Charlie Janiaut, en assure la continuité graphique. Il a pris le parti d’une couverture avec le titre sur un sticker que l’on peut déplacer à volonté. À l’intérieur, il poursuit la même stratégie qui consiste à séparer les combattants : séparer les mots et les images ! Les articles sont imprimés sur des encarts insérés entre les portfolios. Une solution qui rappelle celle des livres anciens illustrés par des estampes tirées sur des presses spécialisées, puis collées sur des « planches » qui étaient insérées entre les feuillets de ces beaux livres.
‹ Avant, on changeait tout le temps de directeur artistique, mais on finissait par faire le même truc en définitive ›, explique Cirimele, dans un aveu qui réaffirme le fameux épigramme d’Alphonse Karr, ‹ plus ça change, plus c’est la même chose ›. Pour les directeurs artistiques, cette formule résume bien le dilemme qu’ils partagent tous : celui de la réinvention permanente, page après page, numéro après numéro, saison après saison, campagne de pub après campagne de pub, révolution technologique après révolution technologique. Ce qui reste la même chose c’est la physiologie du regard : c’est l’écartement des pupilles des yeux des lecteurs, une distance moyenne de soixante-trois millimètres – la seule certitude mesurable. »
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