En couverture : © catalogue 2016 / B2
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« Parti en 2008 au Centre Canadien d’Architecture (CCA) dans le but de mener une étude relative à l’eugénisme et au modernisme de l‘entre-deux guerre, Nikola Jankovic en est finalement revenu avec l’audacieuse envie de créer une maison d’édition à Paris. En automne 2011, l’idée se concrétise avec la sortie de Trouville palaces, villas et maisons ouvrières, un petit recueil de trois études consacrées à l’édification entre 1840 et 1940 de cette station balnéaire française. Plus de six ans après la parution de ce premier opus, la maison d’éditions comptent à son actif 67 volumes répartis en sept collections.
Tout d’abord, le format carte postale. De dimensions 10×15, ces livres «de poche» – qui ont l’avantage de réellement tenir dans la poche puisque même l’épaisseur reste relativement mince – n’échappent sans doute pas aux intarissables curieux. En revanche, leur petitesse ne les préserve pas du risque de passer inaperçu au milieu des pavés monographiques, techniques, théoriques, voire promotionnels sur lesquels les grandes maisons d’éditions affichent leur label. Côté graphisme, malgré le budget très serré dont dispose la jeune maison d’éditions, impossible de nier le soin et l’originalité que Nikola Jankovic et un trio issu de l’école des Arts Décoratifs de Paris ont porté au concept.
A chacune des collections correspond un code coloré – du rouge au violet – puisé dans le spectre visible de l’arc-en-ciel. En couverture, tout aussi élégante qu’énigmatique, voire incongrue, une photographie franc bord traitée en bichromie combinant la couleur d’une des sept collections et un noir profond fait la “une”. Ce même duo coloré se retrouve au fil des pages: si le texte est en noir sur fond blanc, les appels de notes, les notes de bas de page ainsi que l’arrière-plan du cahier iconographique situé au centre de l’édition sont baignés de couleur. Un concept dynamique qui met en valeur et motive la consultation de ces éléments de référence dont la minutie décourage bien trop souvent la lecture. En bas de la couverture, un logo de forme triangulaire –en référence au célèbre avion furtif de l’armée américaine baptisé B-2 – se fond dans l’image […]
Si l’architecture sert de fil rouge aux sept collections et connecte entre eux tous les éléments de l’essaim B2, le champ d’investigation embrasse en réalité toutes les disciplines qui interagissent – de près ou de loin – avec l’architecture. C’est justement cette généreuse marge de manoeuvre “dans le temps et dans l’espace, de Los Angeles à Vladivostok et de l’an mil à nos jours” qui confère tout l’intérêt au “cabinet de curiosités architecturales” […] ».
– Aurélie Buisson cit. espazium.ch –
Extrait d’un entretien avec Nikola Jankovic, créateur des éditions B2
Réalisé par Noémie Spiessert de carrecousucolle.com
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« […] Il y a tant de paramètres à faire jouer : la mise en page, le chapitrage, la maquette, le choix d’un papier, d’un format, la mise en scène plus ou moins discrète ou allusive ; et puis il y a l’impression, la reliure, l’ergonomie, le confort ou l’inconfort de lecture, la mise en place d’une collection de collections, d’un catalogue lentement élaboré. L’éditeur est editor et publisher ; et à lire Roger Chartier, spécialiste de la question, la naissance même de ce métier a aussi fait de l’éditeur un libraire, un imprimeur, un agent littéraire, parfois un auteur aussi… Par-delà son véritable métier, je pense à Pierre Faucheux, à qui je dois beaucoup, mais aussi aux bibliophiles et bibliomanes – si une telle pathologie existe ! Je suis aussi très redevable à la fois à Aurélien Thibaudeau, un des étudiants que j’avais à l’ENSAD, qui m’a secondé avec ses deux condisciples Fabien Labeyrie et Geoffroy Pithon ; et à la fois à Aline Melinand, adorable technico-commerciale de l’imprimerie Darantière avec laquelle nous avons travaillé jusqu’à la triste liquidation judiciaire en 2014 de cet établissement fondé en 1870. A posteriori, ce n’est donc pas tant des “éditeurs” (publishers) qui ont conduit ma sensibilité aux livres, qu’un certain regard sur le monde et la fabrication, la classification et le stockage de ces observations… un peu à la manière dont un architecte est un editor maïeutique, un faiseur de monde !
Quelles sont tes relations avec les graphistes, comment avez-vous imaginés l’identité visuelle de B2 ?
J’aurais presque pu tatouer HATE et LOVE sur mes deux mains tant nos relations sont tumultueuses et passionnelles ! Tout d’abord, tu as raison d’insister sur ce pluriel car l’équation pédagogique et économique m’a d’emblée contraint à écarter le recours à un seul graphiste professionnel ou confirmé. Lors de ma première et unique participation au Salon Light les éditions B2 cohabitèrent à côté des éditions Cent Pages conçues par Philippe Millot et du tandem de graphistes M/M. Quant à Geoffroy, il travaille depuis plusieurs années à Nantes, à l‘atelier Formes vives…
Quoiqu’il en soit, l’idée de travailler de petits livres avec de (très) jeunes graphistes a été à la fois un point de salut humain et économique, et des motifs de désaccords plus ou moins profonds, de part leurs inexpériences ou la mienne propre. Quand mes trois premiers graphistes des Arts Déco passèrent leur diplôme, ils prirent la décision de ne pas continuer l’aventure, après seize livres réalisés ensemble. Grâce à Ludovic Burel (avec qui j’avais enseigné à l’école d’art de Grenoble), je pus retrouver plusieurs nouveaux graphistes rhônalpins : Lionel Catelan et Angelica Ruffier, formés à Valence, firent ainsi connaissance avec Pierre Pautler et Florent Pierre (aujourd’hui atelier Pierre Pierre), formés à Lyon, afin d’intégrer mes modifications et caler la refonte de la grille B2 en open source – que seront par la suite amenés à manipuler Sarah Vadé (Lyon), Axel Pelletanche-Thévenart (Paris) et mon unique stagiaire, Ianis Combes, étudiant en architecture (Toulouse). Collaborer en flux tendu avec autant de graphistes à la fois est compliqué, mais je suis très fier de la réussite de “mes” graphistes, de leurs participations à l’aventure B2 et, plus que tout, de leur fidélité.
Le petit point sur la couverture représente la constellation, l’ensemble relié sur le catalogue. On a envie d’une vision d’ensemble de la constellation en mouvement, et j’aime beaucoup l’image qu’elle représente, ça colle tellement aux thèmes… en aura-t-on cette vision en ligne, en librairie… ?
Le petit point en question s’appelle • confetti • et constitue un punctum focal positionné en fonction de ce que “dit” l’image de couverture. C’est un hommage, discret pour certains et beaucoup moins pour d’autres, à la fois à Pierre Faucheux et à ses collections “Point Seuil”, et à la fois à Roland Barthes et à ses écrits sur la photographie. Ce n’est que bien plus tard, le catalogue s’étoffant, que le confetti a été appelé à devenir un “connecteur” puis à participer aux “constellations” permettant d’associer, le plus souvent par analogies, plusieurs titres ensemble. Très impliqué dans le projet B2 et l’architecture, je considère Lionel Catelan un peu comme mon “graphiste en chef”. C’est à son initiative que, récemment, nous avons amélioré la grille des pages intérieures afin que sa micro-typographie soit optimale et l’occupation “tout utile” de la page, plus économique ». […]
Pour aller plus loin :-
Accéder à la suite de l’entretiens et son intégralité sur carrecousucolle.com
Le site des éditions B2
Regarder la conférence : Parole à l’architecture ceci tuera cela, L’édition d’architecture comme contre-archive
Réecouter l’émission Les architectes, le livre et le design graphique
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3 Comments
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Je voudrais connaître vos éditions
Bonjour,
pour toutes questions je vous invite à consulter le site de l’éditeur editions-b2.com, ils ont également un formulaire de contact à disposition.
Passez une très bonne journée.