Photographie du portrait © Swiss Graphic Design Foundation
–
« Formé au graphisme publicitaire à l’Allgemeine Gewerbeschule de Bâle (aujourd’hui Schule für Gestaltung) où il sera l’élève d’Armin Hoffman, le graphiste bâlois Ifert (1928), devenu entre autres dessinateur de mobilier et concepteur d’expositions, au cours d’une carrière aussi discrète qu’exceptionnelle qu’il debutera a paris en 1949 avec la conception d’expositions itinérantes pour le plan Marshall (European Recovery Program) sous la direction de l’architecte Peter G. Harnden. Après avoir travaillé notamment pour le Centre culturel américain à Paris et les laboratoires Geigy à Bâle, il fonde en 1960 son propre studio parisien, auquel contribuera notamment Rudi Meyer. L’aménagement d’espace, le dessin de mobilier et la scénographie d’exposition constitueront les principaux axes de son activité […] »
– cit. gaite-lyrique.net –
« […] Ifert part à Paris en 1949, par le train de nuit, avec quelques reproductions photographiques de ses travaux d’école et son Diplom als Grafiker en poche. Son rêve est de trouver un emploi auprès d’affichistes français comme Jean Picart le Doux, Jean Colin ou Jacques Nathan-Garamond, futurs membres fondateurs de l’AGI avec les affichistes suisses Fritz Bühler et Donald Brun […] C’est Jacques Nathan-Garamond qui va s’intéresser à ce jeune bâlois et le diriger vers le graphiste suisse Heinrich Steiner qui, à son tour, va le mettre en relation avec Pierre Boucher, un photographe français chargé d’organiser des expositions itinérantes dans le cadre du Plan Marshall. Pendant deux ans, au service de ce projet de “reconstruction” de l’infrastructure intellectuelle du monde occidental, Ifert va pouvoir compléter sa formation professionnelle comme scénographe […] Il sera impliqué dans la création d’expositions aménagées dans des camions extensibles ou dans des péniches se déplaçant sur des canaux en Hollande ou en Allemagne […]
Quand les subventions du Plan Marshall sont soudainement interrompues en 1952, Ifert se retrouve sans travail mais est aussitôt invité à rejoindre l’équipe de René Rudin, directeur de la publicité de Geigy à Bâle. Retour au pays natal, où il est initié à une autre sorte de propagande: la publicité de produits chimiques et pharmaceutiques. En plus des imprimés, d’une sobriété et d’une élégance qui rendent hommage à l’enseignement d’Armin Hofmann, il propose et réalise deux véhicules itinérants, transformables en stand d’exposition et en salle de cinéma. Ifert en est le designer, laissant à Karl Gerstner le titre de graphiste. De 1953 à 1955, ces caravanes pénètrent jusqu’au fond des vallées suisses, jusqu’aux villages les plus reculés, pour vendre aux agriculteurs et éleveurs les engrais et pesticides développés par Geigy.
De retour à Paris en 1956, Gérard Ifert est engagé au Centre culturel américain comme concepteur d’expositions. On lui confie cette fois-ci la section architecture et design pour laquelle il assure la communication — invitations, catalogues et affiches — ainsi que de nombreux systèmes d’exposition démontables […] Le climat économique semble propice. En 1960, Ifert s’installe à son compte. Ses contacts professionnels et amicaux lui procurent de nombreuses ouvertures — avec le design d’expositions toujours au cœur de sa pratique. En 1962, pour le musée Stedelijk, il invente un système de présentoirs déployés sur un éventail de tiges de métal. En 1964, pour l’Unesco, il dessine des tables en ciment aéré qui s’encastrent pour former des origamis de plans inclinés. En 1967, pour les magasins Prisunic, il utilise des éléments préfabriqués pour petit habitat, conçus par l’architecte Jean Maneval. Six petits modules en polyester de couleurs vives, dimensionnés pour être facilement transportés sur route, sont assemblés sur place pour former une jolie roulotte étoilée qui devient instantanément un «pop store» — une boutique éphémère.
Les expositions itinérantes, une des spécialités de l’atelier Ifert, sont l’expression d’un désir d’aller vers les utilisateurs plutôt que d’attendre qu’ils viennent vers vous. Ce n’est pas l’esthétique de la séduction qui prime, ni celle de la persuasion, mais celle de l’empathie. Gérard Ifert non seulement sait se mettre à la place des utilisateurs, mais il est à l’écoute de leur singularité. Il se souvient des noms de tous ses collaborateurs, associés, assistants, collègues, employeurs et employés. Il définit son parcours personnel comme une série de rencontres avec les autres. Toutes les expositions itinérantes qu’il crée sont en quelque sorte des gestes d’amitié.
[…] Minutieusement, millimètre par millimètre, Ifert élabore des solutions inédites. Ce fut le cas pour le réaménagement de la librairie La Hune, en 1969, pour le grand amateur de littérature contemporaine Bernard Gheerbrant. Trois créateurs réputés, dont Max Bill, avaient renoncé à trouver une solution pour mieux rentabiliser l’espace exigu à l’angle de la rue Saint-Benoit et du boulevard Saint-Germain. Gheerbrant, en désespoir de cause, et sur les conseils de son ami Maurice Besset, s’adressa, presque à contrecœur, à cet inconnu qu’était Gérard Ifert
Pour La Hune, Ifert fit un travail d’orfèvre, enfilant comme des perles de fines étagères en tôle sur des montants de bois dont la courbe épousait celle des gestes que l’on fait pour choisir un livre dans une bibliothèque. En remplaçant la traditionnelle planche en bois de 2 cm d’épaisseur par une tôle d’acier, et les supports latéraux qui bloquent la visibilité par une seule arête centrale, il obtenait un gain de place qui, bien que minime (environ 9%), permettait de mettre en valeur beaucoup plus de livres. Même chargés, les rayonnages semblaient flotter sur des coussins d’air […] »
– Véronique Vienne cit. L’invisibilité de Gérard Ifert –
Plus de ressources sur Gérard Ifert :
→ Lire l’article très complet de Véronique Vienne L’invisibilité de Gérard Ifert
→ Regarder la conférence réalisée dans le cadre de Design graphique : Pratique + Critique – 2015
→ Gérard Ifert et les expositions mobiles, une conférence d’Ascanio Cecco
→ Plusieurs réalisations sur le site de la Swiss Graphic Design Foundation
→ Lire Target Group Oriented Corporate Communication: Geigy Films