Editions Allia

Scroll
Vidéo de présentation de la maison d’édition Allia réalisé par les étudiants de l’ENSBA Lyon
et présenté dans le cadre du colloque Exemplaires 2015 | Texte extrait de la présentation.

La “petite collection” Allia

En 1982, Gérard Berréby crée les éditions Allia. Au cours des dix premières année, à peine plus d’une trentaine d’ouvrages seront publiés. Ces dix dernières années, c’est en moyenne trente titres qui sortent chaque année. “ Lorsque les éditions ont eu ne assise et une crédibilité avec un catalogue qui comptait déjà environ 200 ou 250 ouvrages”, composé pour l’essentiel de “texte négligés par les autres éditeurs ou non protégés par le copyright”, ils ont “commencé à publier de la littérature contemporaine”.

En 1995, la maison d’édition connaît une crise très grave, c’est pourtant cette année là qu’est lancée la “Petite Collection” dont Gérard Berréby résume ainsi le principe : “des petits volumes, des textes brefs, très élégants, pas chers du tout, avec des auteurs comme Marx, Casanova ou Adorno”. Son premier titre est La Paresse comme vérité effective de l’homme de Kazimir Malevitch. Ce succès de librairie, qui contribuera à sortir la maison d’édition de la crise qu’elle traversait, et la décision de développer cette collection, vont entraîner une sorte de reconfiguration du catalogue des éditions Allia, au sein duquel ce “nouveau format” va rapidement prendre une place prépondérante. Aujourd’hui, les ouvrages disponibles dans cette collection représentent plus de la moitié du catalogue.

Gérard Berréby insiste beaucoup sur le soin qui est apporté à la mise en forme des ouvrages publiés chez Allia. Cela consiste selon lui à “considérer l’objet-livre dans son emballage, c’est-à-dire sa fabrication, sa conception, sa maquette, son papier, la manière dont on le fabrique… Autrement dit, mille et un petits détails que l’on pratique quotidiennement et qui me paraissent fondamentaux. L’idée étant de fabriquer et de mettre à disposition un objet qui donne l ‘envie d’être pris entre les mains.” Pour ce qui est de la conception graphique, la maison a longtemps fonctionné “à deux têtes ” : “Je suis responsable de la conception intérieure des livres de toutes les collections, déclarait Gérard Berréby, en 2008, et Patrick Lébédeff, graphiste de métier, est responsable de la création artistique des couvertures.” Á la suite du décès de Patrick Lébédeff en 2012, la conception des couvertures est assurée en interne, avec le souci de rester fidèle à la ligne graphique mise en place.

Gérard Berréby indiquait récemment : “Autant nous pouvons être assez inventifs dans la conception des couvertures autant nous choisissons de rester assez traditionnels quant à la maquette intérieure.” En ce qui concerne le choix du caractère utilisé dans les pages de texte, il déclare : “Au début j’utilisais différentes polices de caractère et puis finalement j’ai décidé de ne plus recourir qu’au Plantin.” La palette des caractères typographiques utilisés en couverture est assez restreinte. Aussi l’usage récurent de certaines caractères dessine des ensembles que l’on peut identifier à des collections : la plupart des ouvrages consacrés à la musique, par exemple, ont une couverture composée en Helvetica extra compressed, alors même qu’ils peuvent être publiés dans des formats différents. Dans la “Petite Collection”, c’est l’Optima qui domine. Mais, comme on l’a vu, il est le plus souvent remplacé par l’Helvetica extra compressed, dans le cas des publications relatives à la musique.

La notion de collection est assez mouvante lorsque l’on parle des éditions Allia. Si Gérard Berréby peut déclarer : “chez Allia il n’y a pas de collection”, en d’autres occasions, il parle bien de “Petites Collection” pour désigner les ouvrages publiés dans ce format dont nous avons déjà parlé (100 x 170 mm). De même, il utilise à plusieurs reprises le nom de “collection musique” pour désigner cet ensemble d’ouvrages publiés dans différents formats. On a donc l’impression que deux notions se télescopent : celle de collection et celle de format, l’une et l’autre ne se recoupant qu’imparfaitement. Si la notion de collection convient assez bien pour désigner l’ensemble des textes publiés sur la musique, le terme semble assez inapproprié pour qualifier ce qu’il est convenu d’appeler la ”Petite Collection”. Dans ce dernier cas, le terme de “format” semble mieux convenir, notamment si l’on pense à ce que ce terme désignait dans l’industrie du disque : on peut notamment penser à ce que fut “l’invention” du maxi 45 tours – 12-inch – et aux nouveaux usages qu’il suscita. On pourrait ainsi dire que les éditions Allia ont contribué à l’invention d’un format, ou à son actualisation, en en proposant une forme particulièrement accomplie.

L’analogie musicale de prête d’autant mieux à cette maison d’édition que Gérard Berréby a pu déclarer : “Chez Allia, on a réussi un tour de force absolument unique à mes yeux dans l’époque contemporaine : on a crée un style dans l’époque. On a crée un label comme il y a eu de grands label de disque qui se sont crées dans les années 1950, par exemple. Et le label a cet avantage que les lecteurs veulent tout connaître d’un catalogue et pas seulement le livre qui les a intéressés et qu’ils ont lu.”

→ Un entretien très complet avec Gérard Berréby
→ Les éditions Allia par le collectif carré cousu collé
→ Consulter l’ouvrage La typographie du livre français