Brutalisme – Béton brut

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Images provenant du site fuckyeahbrutalism.tumblr.com

« Dans l’Angleterre des années 1950, un couple d’architectes, Alison et Peter Smithson, dessine les grandes lignes du brutalisme. Ils en choisissent le nom en référence, non pas à la brutalité, mais à la Cité radieuse de Marseille, construite tout en béton brut par Le Corbusier en 1947. “Ils décrètent alors que tout bâtiment doit exposer clairement sa structure”, explique aujourd’hui, l’architecte urbaniste Jacques Sriglio, spécialiste de Le Corbusier. “Les matériaux sont mis en valeur pour leur qualité intrinsèque, sans fard. Le brutalisme, c’est l’idée de retourner à la manifestation primitive de ce qu’une construction peut dire. Sa banalité, devient sa force d’expression” […] » (Elvire Emptaz cit. nouvelobs.com)

« Écartons d’emblée toute ambiguïté : Le Corbusier ne s’est jamais désigné architecte brutaliste, ni d’ailleurs peintre puriste, détestant naturellement être catalogué de quelque manière que ce soit. De même est-il aussi nécessaire d’indiquer qu’il n’a jamais théorisé ce‹tte notion de brutalisme à propos de son architecture, se limitant à déclarer : “Depuis la guerre où j’ai eu certaines commandes… j’ai eu l’occasion de faire, d’employer enfin le béton. Par la pauvreté des budgets que j’avais, j’avais pas un sou et c’est aux Indes surtout que j’ai fait ces premières expériences. J’ai fait du béton brut et à Marseille je l’avais fait également de 47 à 52… ça a révolutionné les gens et j’ai fait naître un romantisme nouveau, c’est le romantisme du mal foutu.”

“Béton brut”, “romantisme”, voilà au moins deux termes qui autorisent à interroger l’œuvre de Le Corbusier d’après 1945, au regard de ce courant que l’historien Reyner Banham a défini comme le brutalisme. Courant essentiellement anglo-saxon mais qui ne saurait ignorer, malgré de sérieuses divergences, à la fois l’apport et le compagnonnage de Le Corbusier. Éthique ou esthétique, le courant brutaliste, tel qu’il se manifeste au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, se présente comme une nouvelle tendance de l’architecture moderne, une tendance particulièrement radicale, dont on ne peut limiter les significations au seul emploi du béton brut de décoffrage. Comme l’écrivent ses principaux thuriféraires : “Toute discussion sur le Brutalisme manquera son but si elle ne tient pas compte de la tentative du Brutalisme d’être objectif à l’égard de la réalité. […] Le Brutalisme essaie de faire face à une société de production de masse et d’arracher une poésie rude des forces confuses et
puissantes qui sont en jeu.” Pas étonnant alors que face à ce‹s déclaration d’intention, très déterminée, l’Unité d’habitation de Marseille, construite entre 1945 et 1952, et qui condense à la fois questions sociales et poésie architecturale, ait pu servir, entre autres références, au développement de ce‹tte nouvelle tendance. […] Selon la définition qu’en donne Reyner Banham, le courant brutaliste se doit d’appliquer les trois règles suivantes : une lisibilité formelle du plan, une claire exposition de la structure et une mise en valeur des matériaux à partir de leurs qualités intrinsèques, tels qu’ils sont trouvés. […]

Pour autant, si Le Corbusier ne peut être considéré, au regard de l’histoire de l’architecture du xxe siècle et notamment en France, comme un précurseur dans l’emploi du béton brut de décoffrage, précédé en cela par son ancien maître Auguste Perret, reste qu’il va lui donner ses lettres de noblesse au travers d’une grande liberté formelle et poétique, rarement atteinte jusque-là dans l’histoire de l’architecture moderne. […] (Jacques Sbriglio cit. Le Corbusier et la question du brutalisme)

« Dans la version originelle du brutalisme, on distingue une forme d’utopie sociale violente. Les constructions aux matériaux peu chers et aux fioritures bannies sont vouées à abriter le peuple dans des micros sociétés autosuffisantes où la circulation et l’harmonie entre les bâtiments favoriseraient les interactions entre les habitants. Concrètement, cela donne, outre la Cité radieuse à Marseille, des lieux comme le couvent de La Tourette, près de Lyon, les tours d’habitation Aillaud à Nanterre ou Barbican à Londres, ou dans un autre genre le Centre national de Danse de Pantin, le Musée de la sculpture de Sao Paulo, l’ambassade du Koweit à Tokyo […] » (Elvire Emptaz cit. nouvelobs.com)

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