« Il faut qu’en tournant la page, surtout pour les albums, il se passe quelque chose . (…) C’est comme en cuisine, on a beau avoir les meilleurs ingrédients du monde, si on ne sait pas les accommoder, c’est raté ! L’album demande un metteur en scène. Quand je vois un film, je vois une mise en page, car, pour moi, le livre est très proche du film. Il y a des séquences, des zooms, des contrastes… Il faut des ruptures d’échelle.¹ »
« Successeur de Pierre Faucheux et de Jacques Darche, tous deux typographes avant-gardistes, Massin joue des lettres et de leurs formes. Dés les années 1950, il donne au livre une vraie valeur d’objet esthétique en expérimentant un graphisme dédié à l’alphabet tout entier. Tout commence en 1948, Massin entre au ‹ Club français du livre ›, pour y insuffler une nouvelle vision du graphisme éditorial. Considérant le livre dans sa globalité, Massin repense toute la ligne graphique, en réalisant des couvertures où lettres et ponctuation s’affirment à travers un style dynamique à ce jour peu répandu, si ce n’est au sein d’œuvres de graphistes polonais tels que Roman Cieslewicz.
Chez Massin, les bouches hurlent les phrases, celles-ci se déformant sous la pression des lettres. Disproportionnées, tordues, les syllabes se répondent entre elles, apparaissant pour la première fois vivantes, comme ce fut le cas dans les travaux dadaïstes de Raoul Hausmann ou de Kurt Schwitters. Massin ose les aberrations formelles et enchaîne les entorses aux règles sévères de la typographie d’hier. Didones et garaldes s’emboitent les unes dans les autres, à l’image du logotype qu’il réalise pour les Musées de France, où le ‹ m › semble se blottir contre le ‹ f ›. Cette tendre histoire de caractères, d’empattements et de chasse résume ainsi l’oeuvre de Massin (…)² »
« On détestait le code typographique et toutes les règles anciennes de composition³ »
« Les anamorphoses lui posèrent des contraintes techniques incroyables. Les optiques de Cliché Union ne lui suffirent pas pour rendre compte des modulations innombrables de la voix des acteurs. Massin est mélomane, humaniste érudit. Mozart a peu de secret pour cet homme aux multiples talents. Ce faisant il ne trouva pas mieux que d’imprimer les textes à déformer sur des bouts de préservatifs (condoms) qu’il put triturer dans tous les sens, et infléchir les mots afin d’en rendre le sens de la manière la plus expressive possible.⁴ »
¹ Robert Massin cit. Télérama, 9 mai 2001.
² Agathe Hoffmann, cit. pixelcreation.fr
³ Robert Massin, cit. La typographie du livre français
⁴ Peter Gabor, cit. paris.blog.lemonde.fr
Plus de ressources sur Massin :
→ Un entretiens très complet en 3 parties avec Massin sur pedromarquesdg.wordpress.com
→ La Cantatrice Chauve par Peter Gabor.
→ Présentation de l’exposition Massin : la typographie en jeu
→ France Culture, émission en compagnie de Massin (9:30)
→ Des passages très interessants dans Du calligramme à l’OLNI par Pierre Duplan et La typographie du livre français
→ Un article très complet sur undessinparjour.wordpress.com
→ Feuilleter différents ouvrages sur le channel de liberedit
→ Des ouvrages réalisés par le Club du livre Français sur ce flick’r et sur designers-books.com